5.2 Workshop 2: le mouvement à l’intérieur du plan

QUAND ?

Du 3 au 6 février 2009

OU ?
ECAL, Renens

QUI ?

5 élèves de 2ème année, département cinéma

Encadrement : Sam et Fred Guillaume, Laurent Kempf

Objectifs

Théoriques

  • introduction aux notions de vision humaine, de captation et de reproduction du relief
  • introduction aux paramètres de base de prise de vue (entraxe, angulation, focale, limitations,…) et présentation d’exemples.
  • analyse de films reliefs sous l’angle de l’utilisation de l’espace dans la profondeur et de l’emplacement du plan stéréo au service de la dramaturgie

Pratiques

  • travail sur la modification du plan stéréo en post-production
  • maîtriser la fabrication de séquence relief dans after effect
  • tournage d’un plan séquence dans lequel le relief amène une dimension dramaturgique supplémentaire

Travaux pratiques

essais libres

Avec deux caméras Sony PC-100E montées sur un support à 7cm d’entraxe et en parallèle (sans angulation), les étudiants qui n’avaient aucune expérience du relief ont filmé des sujets de manière libre.

Ces caméras possèdent des avantages non négligeables pour le relief: leur encombrement réduit permet de travailler avec un entraxe de 7cm au minimum, la télécommande permet de lancer la capture de manière simultanée (à l’image près), le zoom peut être activé par télécommande également, ce qui permet de faire des modifications de focale coordonnées (en effet, la bague de zoom n’est pas actionnable manuellement). Enfin, le panneau du player se situe à l’arrière, ce qui évite de devoir démonter le module pour passer en mode lecture.

Ce petit exercice a permis de se rendre compte de plusieurs phénomènes:

1.Un entraxe et une angulation fixes amène de nombreuses limitations

Tout n’est pas rendu de manière optimale en relief lorsque l’on utilise un réglage d’entraxe et d’angulation fixe (imposés pour cet exercice). En effet, le choix de l’entraxe et de l’angulation à la prise de vue modifie fortement la restitution du relief et le choix des sujets. Il est donc indispensable de porter une grande attention à ces paramètres lors du tournage.

Il est vrai toutefois que dans certains cas, il est envisageable de jouer sur le re-alignement horizontal des images en post-production, modifiant ainsi l’emplacement du plan stéréo. Cette opération possède toutefois le désavantage de créer une perte sur les bords de l’image. Voir l’exemple ci-dessous pour plus de détails.

1.voici un couple stéréo (à voir avec des lunettes anaglyphes) telle qu’il aurait pu être capté. On remarque que le plan stéréo se situe au niveau de l’arbre (points homologues confondus). Ce n’est pas forcément une bonne chose dans ce cas, la maison se trouvant en jaillissement total, et une forte erreur de fenêtre est présente au niveau du sol. Partant de là, nous voulons corriger cela en post-production en faisant le choix de placer la maison et l’arbre derrière le cadre de l’écran (la face avant se situant sur le plan de l’écran).

2.pour cela, nous faisons une translation latérale des vues droites et gauches jusqu’à ce que les points homologues de la face avant se confondent. Par ce procédé, on fait glisser l’espace d’avant en arrière par rapport au plan de l’écran. Nous observons à gauche et à droite deux bandes verticales qui sont les pertes dues au déplacement latéral des vues.

2. Modification du plan stéréo en cours de plan

Lors d’une séquence en caméra portée suivant un personnage dans une maison abandonnée, il s’est avéré que certains passages étaient problématiques (non fusionnables) en raison du rapprochement soudain du sujet ou d’un élément de décor. Nous avons tenté de modifier l’emplacement du plan stéréo en post-production pour rendre les images plus lisibles. Force est de constater que cela fonctionne et que la plupart des passages critiques ont été rendus fusionnables. Le choix de l’emplacement du plan stéréo (qui est lié au choix de l’entraxe et de l’angulation) est donc un paramètre qui peut être modifié en cours de plan à la manière d’un suivi de point. Si l’on travaille avec un module fixe, on a la possibilité de réaligner les images en post-production; dans ce cas, il faut prévoir un cadre de sécurité pour compenser la perte d’information sur les côtés lors du réalignement horizontal des images.


Dans la séquence ci-dessous, nous avons également réaligné les images en post-production afin de garder constamment le sujet sur le plan stéréo. Il s’avère que cette opération améliore considérablement le confort visuel.


3.influence des indices de profondeur sur la sensation de relief

Comme on pouvait s’y attendre, l’influence des facteurs perceptifs ou dynamiques autres que la vision binoculaire est très grande. Ces indices prennent parfois le dessus sur les informations données par la vision stéréoscopique. Lorsqu’on compose une image, il convient de ne pas oublier de prendre en compte ces facteurs (qui sont d’ailleurs aussi valables pour l’image 2D). La sensation de relief sera directement affectée par ces indices.

Ainsi, les lignes de fuites d’un couloir, d’une route ou des rails donnent une indication très forte de la profondeur.

4.le relief donne l’envie d’aller « voir derrière »

La plus grande sensation de réalité induite par le relief produit un phénomène intéressant que nous avons pu observer lors de ce workshop. En effet, lorsque qu’un espace ou un sujet est masqué par un élément de décor ou un personnage, l’envie est forte de se pencher latéralement (comme on le ferait dans la réalité) pour voir « derrière ». Or, comme on l’a expliqué, l’espace représenté se déforme à la faveur du déplacement du spectateur par rapport à l’écran (en savoir plus). Il n’y a donc pas d’espace masqué qui puisse se découvrir sans que le réalisateur en fasse le choix et déplace sa caméra. Ce phénomène peut être un source de frustration pour le spectateur mais aussi un paramètre utilisable au service de la dramaturgie.

Robert Zemeckis l’a utilisé de manière intéressante dans Polar Express (plus de détails)

Tournage d’un plan-séquence

Partant de ces observations, les étudiants ont réalisé deux plans-séquence, l’un en caméra portée, l’autre en caméra fixe.

Le premier tente d’impliquer le spectateur en lui faisant découvrir des espaces inquiétants en même temps que le protagoniste. Il joue également sur l’effet de cadre dans le cadre très propice au relief. Il est à noter que pour cette séquence, le plan stéréo a été modifié en permanence en post-production (sur after effect).

Le second plan tente de nous faire sentir les matières et les textures d’une recette de poulet à l’aubergine qu’on ne trouvera certainement pas dans Betty Bossi….faisant le choix d’un plan à hauteur de table, les réalisateurs nous impliquent dans l’action; cet effet est renforcé par le rouleau à pâte et les petits pois qui jaillissent légèrement. Le titre final créé sur maya a été incrusté en post-production.

Remarque: L’anaglyphe supportant mal la compression vidéo, nous avons choisi quelques photogrammes a regarder avec des lunettes rouge-bleu.

Expérimentations sur Maya

Parallèlement, Laurent a continué ses essais sur Maya avec notamment un plan de Star Wars en relief et un plan qui utilise l’effet de transtrav popularisé par Hitchcock dans Vertigo. Ce procédé consiste à reculer la caméra sur un chariot de travelling tout en faisant un zoom avant afin de conserver les mêmes proportions pour un élément choisi. Cet effet donne la sensation que l’espace se déforme. Nous avons pu constater qu’il fonctionne parfaitement en relief.



Nous remercions vivement Philippe Nicolet pour le prêt d’un écran plat stéréoscopique Miracube et de lunettes NVP. Ce matériel nous a permis de voir les images sur un autre support qui aura certainement tendance à se populariser dans les années à venir. Nous avons également pu voir des séquences tournées par NVP3D, ce qui a constitué une base de discussion précieuse.

Voici une sélection de remarques des participants au workshop 2:

« la 3D amène une nouvelle dimension, celle de la profondeur; cela redéfinit la composition du plan filmé. je trouve le procédé relativement simple sur le tournage mais encore laborieux en post-production et complexe au niveau de la diffusion. »

« la 3D, c’est TOP COOL »

« après la première journée de workshop, j’ai réalisé que je voyais le monde en trois dimensions… »

« l’exercice est intéressant du point de vue du résultat et de la technique. J’ai bien aimé être confrontées à cette « nouvelle » vision du cinéma, mais je ne souhaite pas l’utiliser pour la suite de mes travaux personnels. »

quelques photos de travail pour terminer: